
Le poème de la semaine est tiré du recueil Les ouragans intérieurs que Nora Atalla a dédié à son fils Mathieu en 2014. Si les tremblements sont dit intérieurs, on constate, dans cette poésie imagée, qu’ils peuvent secouer la terre entière.
Dérives de paillettes
dans le charbon de la nuit
l’heure roucoule au creux de l’oreille
l’espérance veille dans les abysses
tachées de rouge
d’esquilles et d’épouvante
chaque séisme remue les racines
emmêle les fragments de sourires
ses épines transpercent les paupières celées
leurs cils poissés
et de souvenirs
et de tant de visages
dérives de silhouettes
détachées de leurs corps
une à une s’éloignent
sans point de retour
l’aveuglement éclipse le jour

Nora Atalla est une poète fort active dans le milieu de la poésie québécoise. Auteure de deux romans, un livre de contes et huit recueils de poésie, elle organise également la Nuit de la poésie lors du Festival, fort bien nommé !, Québec en toutes lettres dans la capitale nationale.
Installée aux Écrits des forges depuis 2011, sa poésie propose des images percutantes qui installent un climat où l’espoir côtoie la terreur, comme ici. Ayant beaucoup voyagé, Nora Atalla allie l’universel à l’intime dans des textes souvent « engagés » (La gestation de la peur), dénonçant des conflits, des discriminations, des cruautés (Morts, debout !).
L’humanité entière lui importe, mais surtout les laissé·e·s pour compte, les victimes, les personnes racisé·e·s. Elle se tient droite devant l’adversité, telle une infatigable pacificatrice d’ouragans intérieurs, ces combats en soi-même qui provoquent, parfois, des guerres destructrices.