Michael Gouveia, photo: Rodrigo Olmos Hortiguela
La découverte de nouvelles voix en poésie prouve hors de toute fiction raisonnable que ce genre littéraire reste vigoureux et attrayant pour les plus jeunes prenant la plume. En toutes lettres vous présente et vous fait entendre le mots de Michael Gouveia, publié par les Éditions L’Interligne. Entrevue avec un jeune écrivain prometteur.
Comme beaucoup d’ancien·ne·s étudiant·e·s en Littérature, Michael Gouveia souhaitait entreprendre l’écriture d’un roman à la sortie de l’université. Les mots, la langue et la vie en ont décidé autrement.
» J’ai commencé à écrire pour moi-même, sans trop juger ce que ça pourrait donner. Au début, c’est un peu un non-sens, selon moi, de penser écrire pour les autres, sans savoir si ça va être publié ou si ça pourrait intéresser quelqu’un. La poésie s’est imposée par des élans créatifs qui me sont venus. Peu à peu, j’y ai vu un fil conducteur, ce qui a mené au recueil. La poésie accorde une certaine liberté dans l’écriture tout en permettant d’explorer des côtés plus obscurs »
Le désir d’écrire n’est pas venu très tôt dans sa vie. Son enfance dans une famille portugaise n’a pas été marquée par les livres. Il dit avoir développé son goût pour la lecture, puis l’écriture, par lui-même, à l’école. « C’est vraiment au cégep que ça m’a interpellé et m’a poussé à étudier en littérature à l’université. »
Le néant et les choses
Son recueil est divisé en deux parties: Le néant et Les choses. Il y explore les thèmes de l’écriture, de l’existence, de l’errance et de la solitude dans un climat d’entre-deux, d’où le titre : Les exercices somnambules.
« On est un peu dans un flottement dans le livre entre le sommeil et l’éveil dans l’attente de quelque chose. Ça parle de la difficulté d’entrer dans la réalité après une longue période d’isolement. «
Une incertitude semble habiter le poète dans son livre, état soutenu par l’idée d’apparaître ou de naître au monde, ou pas. Le vide attire. Du moins le retrait, la distance, voire une certaine absence. Les questions affluent, les paradoxes également.
» la vie est-elle pour tout le monde / est-ce qu’on porte l’espoir comme un masque ? « , écrit-il, et, plus loin, « on pourrait me cloner me continuer / vivre pour moi « , écrit-il.
Recueil existentiel s’il en est, Les exercices somnambules est le fait d’un artiste sensible à l’immensité de l’univers, d’un poète qui voudrait effectuer un arrêt complet sur image pour comprendre les choses et le monde qui l’entoure.
« Le fil conducteur du recueil c’est un dilemme, la difficulté d’atteindre l’équilibre. Lorsqu’il est atteint, ça ne dure jamais longtemps. Il y a un va-et-vient de l’espoir, je dirais. Il y a une angoisse qui est propre à l’ouverture au monde, confrontés que nous sommes à la marche du temps. »
Certains poèmes tiennent en une ligne, d’autres s’étirent dans un long souffle. La forme s’adapte au propos, aux émotions parfois vives.
« J’ai l’impression qu’il arrive aux lecteurs de poésie d’ouvrir un recueil de façon aléatoire en souhaitant retrouver quelque chose du moment présent. Je l’ai écrit un peu comme ça, aussi. La poésie porte l’idée de recommencement à chaque page. »
Il y aura d’autres commencements pour Michael Gouveia. Entre le néant et les choses, le champ qui s’ouvre devant lui s’annonce vaste et fertile.

Michael Gouveia
Les exercices somnambules
L’Interligne, 2021
72 pages