
Renaud Lacelle-Bourdon, Anne-Marie Levasseur, Sébastien Dodge et Éric Paulhus. Photo: : JG+Shi X Résidence
Mathieu Gosselin, Simon Rousseau, Amélie Bonenfant, Sophie Cadieux, Lise Martin, Rose-Maïté Erkoreka, Renaud Lacelle-Bourdon, Anne-Marie Levasseur, Sébastien Dodge et Éric Paulhus ont tissé des liens au Conservatoire d’art dramatique il y a près de 25 ans. Depuis ce temps, ils et elles créent et jouent ensemble. Leur Banquette arrière, le nom de la compagnie officialisant cette amitié fructueuse, a 20 ans cette année. Codirecteur artistique depuis les tout débuts, Éric Paulhus, nous parle des hauts et des bas de cette aventure théâtrale unique qui continue d’avancer et de faire des petits.
Si on peut observer un certain renouveau du côté de la formation de jeunes troupes de comédien.ne.s dans les dernières années, rares sont les plus anciennes qui auront fait long feu et produit autant de spectacles,13 en 20 ans, que La banquette arrière. Leur style et leur pertinence demeurent intacts : une troupe de créateurs.trices qui ont des choses à dire et qui le réalisent ensemble depuis 25 ans.

« C’est vraiment comme une relation amoureuse, note le comédien et codirecteur artistique Éric Paulhus, qui partage cette tâche avec Rose-Maïté Erkoreka depuis quelques années. Par moments, ça coule de soi, à d’autres, il faut travailler la relation. On a eu la chance, dès le départ, d’être un groupe uni et respectueux. Nous sommes des artistes qui s’admirons mutuellement et nous avons toujours pris soin les uns des autres. Dans les compagnies de théâtre, il y a beaucoup d’heures non comptées, d’oubli de soi, de longues journées de travail, de dévotion. »
La crise pandémique aura affecté tout le monde du théâtre, mais la Banquette est demeurée solide sur ses assises.
« On a connu plusieurs niveaux de défis comme beaucoup d’autres avec tous les reports de saison, notamment. On a continué de développer des projets en se retrouvant toutefois devant un horizon bouché pour les deux ou trois prochaines années. On a dû abandonner aussi nos événements bénéfices et refaire nos contacts de ce côté. Et il y a une pénurie de main d’œuvre côté technique. »
La Banquette 2.0
Contournant ces obstacles, les membres de La banquette arrière ont d’autant plus le goût de célébrer ces 20 ans avec un site internet, une nouvelle signature visuelle, des balados et la préparation de nouveaux spectacles.
« On tenait à réaffirmer notre singularité, souligne Éric Paulhus, et le fait qu’en plus d’être des interprètes, on est des créateurs.trices. C’est lors de cette réflexion que sont apparus notre nouveau site internet et un logo qui est une œuvre d’art ayant à la fois la courbe et l’angulaire [voir plus bas]. On a toujours eu un désir de propos sans être didactique. Le ludisme et la théâtralité ont toujours été importants pour nous. »
Ludisme et engagement, peut-on ajouter. Les 13 productions de la Banquette forment une mosaïque tablant autant sur un humour allant du noir au burlesque en passant par de réelles préoccupations sociopolitiques. La troupe diffuse depuis le mois de février quatre balados qui donnent une deuxième vie aux spectacles La fête sauvage (2006 et 2009), Silence radio (2010), Province (2012) et Damnatio Memoriae (2014), cette dernière pièce se révélant d’une actualité troublante en balado eu égard à la situation politique mondiale.
« Le théâtre de création est éphémère encore plus qu’avant, explique le codirecteur artistique. Quand on a commencé, on jouait pendant quatre semaines, maintenant c’est trois semaines. On passe beaucoup de temps à préparer un spectacle, de la levée de fonds à la création. Il est important de revisiter nos pièces dans un nouveau format. Dans le cadre de notre 20e anniversaire, on l’a conçu comme un archivage de notre production. »
https://podcasts.apple.com/us/podcast/sur-la-banquette-arri%C3%A8re/id1607905121

Unis et libres
Tel le Québec au Canada, La banquette arrière ce sont des artistes indépendants dans un groupe uni. Tous et toutes ont des carrières bien établies en dehors de la compagnie. En 20 ans, il est arrivé qu’un ou une des membres de la troupe ait envie de prendre ses distances, mais il n’y a jamais eu de divorce.
« C’est bien parce que les gens reviennent avec un nouveau bagage à partager. Quand Renaud Lacelle-Bourdon est allé travailler avec Dave Saint-Pierre, il a découvert que le côté physique du jeu était primordial pour lui. Dans nos laboratoires par la suite, c’est quelque chose qu’il a ramené au groupe. Quand un spectacle émerge de notre travail, on demande qui sera de l’aventure. Sans obligation. C’est la force du nombre. »
« En 20 ans on a appris à se connaître, ajoute-t-il. On est devenus plus riches sur le plan artistique, on a développé plein d’expériences. On est moins naïfs qu’on l’était il y a 20 ans. Si ça veut dire de faire moins de spectacles et de les faire encore mieux, ce sera ça. Notre rythme de travail sera davantage de deux ans maintenant. »
Désormais cette troupe de jeunes quadragénaires, dont les dix membres élèvent un total de 16 enfants, veut transmettre son savoir-faire créatif aux plus jeunes. « Avant la pandémie, on avait commencé à intégrer des gens de la relève. On sent cette obligation envers eux et elles, tout en souhaitant que la Banquette puisse avoir une suite. »
Lorsque leur prochaine création prendra l’affiche en septembre 2023, cela fera donc 25 ans qu’ils jouent ensemble. Un anniversaire n’attend pas l’autre quoi!
« Quand on a commencé, à part Le éternels pigistes, les compagnies d’acteurs et d’actrices avaient disparues depuis les années 70. Récemment, plusieurs nouvelles compagnies ont vu le jour. Je ne sais trop si c’est en raison de la nécessité de prendre parole ou d’horizons de travail plus difficiles, mais c’est bien. Quant à la Banquette, notre structure est restée unique, notre signature aussi. »
