THÉÂTRE : Marie Brassard, magicienne

Marie Brassard dans Violence, photos: Marlène Gélineau-Payette

Le 15e Festival TransAmériques commence aujourd’hui à Montréal avec 26 spectacles en salles, en extérieur et en ligne. Après un report d’une année, Marie Brassard y présente, enfin, Violence du 27 mai au 2 juin. Un solo où elle ne sera pas tout à fait seule sur scène grâce aux merveilles de la technologie.

Violence de Marie Brassard n’est pas un spectacle sur l’enfance, mais il prend racine dans la vision du monde des enfants et des phrases nées dans leur petite, mais si grande tête: « Regarde, on dirait une petite fleur japonaise qui n’est pas encore née »  ou encore « Le dieu a été mis chaos » .

C’est la sagesse des enfants, et non leur naïveté ou leur innocence, qui aura inspiré la grande dame de théâtre dans cette quête des violences de toutes sortes.

« Les enfants nous arrivent avec une connaissance et une façon de s’exprimer. On les corrige, on les formate pour qu’ils deviennent des adultes « convenables ». C’est peut-être l’une des premières violences auxquelles on est confronté, cette éducation comme si on n’était pas adéquats au départ. J’ai aussi réfléchir aux violences cachées, dont la nôtre face à la nature. »

« Le spectacle, ajoute-t-elle, est un mélange de genres avec des bouts abstraits, poétiques, tout en étant très ancré dans notre réalité. Violence part d’où on vient et parle d’où on va. Ça parle de cette antichambre où des êtres attendent d’exister, du désir de vivre et, même, de celui de mourir. »

Filtre pandémique

Sans didactisme, on s’en doute bien chez Marie Brassard. Elle conçoit d’ailleurs que les spectateurs pourront recevoir sa création à travers le filtre pandémique des derniers mois. Une chose est certaine, ce n’est pas la représentation crue de la violence qui l’intéresse en premier lieu.

« C’est difficile pour moi d’en parler avant que la pièce existe, avoue-t-elle. Je travaille un peu comme une chorégraphe. Plus que jamais, j’ai voulu créer une sorte de chaos jusqu’au moment où la pièce m’est apparue. »

Pour y arriver, elle souligne le travail de toutes celles et tous ceux qui ont plongé dans cette nouvelle aventure. Avec la magie du cinématographe – l’invention des frères Lumière débarquait à Montréal il y a exactement 125 ans en juin -, Marie Brassard sera accompagnée par deux Japonaises, une actrice, Kyoko Takenaka, et une danseuse, Miwa Okuno. Le musicien Alexander MacSween jouera aussi en direct sur scène.

« Les films ont été tournés au Japon dans une ville et au bord de la mer. Je suis très fière de ce segment du spectacle. L’équipe a beaucoup tourné et cela donnera naissance à un autre projet, un film qui sera terminé l’an prochain au Japon. »

Marie Brassard fait confiance à une équipe qui est souvent la même dans ses spectacles. C’est elle qui dirige le bateau dans la tempête créative en s’outillant d’une technologie impressionnante, mais en symbiose avec des créateurs·trices tout aussi habiles et inventifs.

« Ce sont des gens particuliers, confie-t-elle, qui sont, justement, capables de se laisser aller dans le chaos. Les choses demeurent vagues assez longtemps et on plonge tous ensemble. Ce sont de vrais artistes, courageux et persistants. On travaille dans un grand climat de confiance. »

Ce climat a pu être recréé heureusement pendant un mois de résidence à l’Usine C. Mais la pandémie aura tout de même « mille fois compliqué les choses », souligne Marie Brassard.

« Il a fallu repenser le projet sous une autre forme. Normalement, on est tous ensemble tout le temps pendant deux mois. C’est une expérience de vie. On a été coupés de tout ça. Cela a occasionné des moments très difficiles. On a eu besoin de plus de temps et d’énergie pour trouver la bonne formule. »

Entre l’instinct et les machines, avec ou sans pandémie, Marie Brassard adore explorer de nouvelles formes, contenus et contenants. Elle a toujours vu la technologie comme une extension du corps et ce n’est pas différent dans Violence.

« Ça reste un outil qui me permet d’aller plus loin, d’inventer des mondes. Quand c’est prêt, c’est limpide. Quand ce ne l’est pas, également. Mais je ne cherche pas à tout expliquer, j’aime garder des zones de mystère. »

Magique Marie.


https://www.youtube.com/watch?v=x31jXbT4iF4