THÉÂTRE : Se prendre en mains

Véronique Pascal a traduit et jouera dans Couper dès le 14 mars au Prospero. Il s’agit de la toute première fois qu’est présentée au Québec une pièce du réputé dramaturge australien Duncan J. Graham. Un texte qui mêle l’étrangeté à un sujet très concret, la peur que ressentent souvent les femmes quand elles marchent dans la rue.

L’autrice et comédienne Véronique Pascal dit avoir eu la main particulièrement heureuse quand Patrick Rozon du Zoofest lui a parlé en 2016 d’une pièce qu’il avait vue au Festival Fringe d’Édimbourg, Cut, du dramaturge australien Duncan J. Graham.

 » Je n’avais jamais vu un texte d’un tel rythme. C’est très court, un heure maximum, mais saisissant, fort. Je savais que je pouvais le porter. J’ai contacté l’auteur qui m’a donné carte blanche », confie-t-elle en entrevue.

Le public sera placé à l’intérieur d’un dispositif scénique incluant le personnage principal, une agente de bord qui, dans le récit, est suivie constamment par un homme farouche. Décrite comme un thriller et une installation artistique tout à la fois, la pièce Couper renvoie au cinéma de David Lynch où la lumière, signée ici par le jeune maître Cédric Delorme-Bouchard, joue un rôle prépondérant.

« Le texte est construit sur les interruptions de la pensée, décrit sa traductrice. Dans une journée, elles vont souvent se promener d’un endroit à l’autre rapidement, sans transition. C’est ce qui se passe ici. Duncan et son actrice ont travaillé ensemble sur ce projet. C’est intéressant de voir un auteur redonner à une interprète sa capacité créatrice. La lumière est hachurée dans la pièce comme l’est le fil de nos mythologies intérieures, entre notre imaginaire et nos émotions. »

Horreur !

L’horreur peut survenir au coin de chaque rue peut-on croire, mais le spectacle se situe tout de même loin d’une soirée Meurtre et mystère présentée dans une maison hantée. Pour le dire simplement: le personnage invite à un voyage qui connaîtra quelques turbulences, en fait, portant à réflexions.

 » Les agentes de bord sont généralement des personnes assez charismatiques, bienveillantes. Celle-ci nous fait croire que le voyage va bien se dérouler. Ce qui nous intéressait c’est le destin de cette femme qui décide de ne plus être une victime et se permet un  » empuissancement « . Elle donne ce pouvoir au public aussi. Quand on vit des émotions fortes, c’est plus grand que nous, ça explose en nous. C’est ça qui se passe aussi dans un film d’horreur. »

Comme si les dieux se réunissaient pour rire ensemble de la condition humaine. On sait comment finissent les tragédies grecques d’ailleurs à ce sujet. Mais Couper tranche justement avec l’inéluctabilité tragique.

 » C’est une nouvelle mythologie que crée Duncan puisque le personnage se reprend en mains. Par rapport à la violence subie par les femmes, moi, je revendique le droit à la colère et à leur violence. J’ai fait beaucoup de sports assez violents. On a cette violence en dedans de nous, mais personne n’accorde ce droit aux femmes. Duran t toute notre vie, on se faire dire de sourire et d’être douce. Le personnage prend conscience de sa force dans la pièce. C’est quelqu’un qui ne s’excuse pas d’exister. « 

La mise en scène est assurée par Marc-André Thibault qu’on a vu comme comédien dans Rouge Speedo et Les Ossements du Connemara entre autres.

 » Je trouve que c’est cool ce qu’on a réussi comme équipe en préparant le spectacle. Ça va être une expérience particulière et « empuissançante ». »


Couper est présenté dans la salle intime du Prospero du 14 mars au 1er avril.