THÉÂTRE : Être ou ne pas être… soi

Bluff, photos: André-Anne Laroche

Après quelques délais covidiens, le spectacle en téléprésence Bluff , des Productions Quitte ou Double, sera enfin présenté à Montréal et simultanément ailleurs au Québec. Les technologies de l’image ont changé nos vies. La pièce pose la question de l’authenticité dans ce contexte où se confondent perceptions et réalités. La metteuse en scène Mireille Camier nous en parle.

Bluffes, bluffons, bluffez. Est-ce que la vie est un bluff ? Au théâtre, grâce à la technologie développée par la SAT (Société des arts technologiques), la question peut se transposer en même temps sur trois scènes avec trois interprètes différents qui tentent de démontrer leur honnêteté et leur intégrité.

Le spectacle mêle philosophie et humour afin d’explorer l’épaisseur de la cloison entre l’image que l’on projette et l’interprétation qu’en tire ceux et celles qui la reçoivent.

« Ça fait presque 10 ans qu’on vit avec une identité physique et, une autre, virtuelle, fait valoir Mireille Camier. C’est une question d’authencité. Dans Bluff, chaque personnage se questionne sur la façon de se présenter et sur l’authenticité de ses actions sur Instagram, par exemple. Est-ce possible de vivre des relations à distance ? Est-ce qu’on se bluffe soi-même sur les réseaux sociaux ? Dans ce contexte, comment faire pour ne pas être tenté de maquiller la réalité? Je est un autre, disait Rimbaud. »

Depuis le début de la pandémie, la technologie a pris une plus grande importance dans notre rapport au virtuel et il devient fort intéressant de fouiller ces problématiques. La metteuse en scène précise qu’il s’agit d’une « réflexion ouverte ».

Le mensonge, l’hypocrisie, les faux semblants, les faire valoir… Quand est-on vraiment soi-même? Une fois seul? En dormant?

« Il y a différents bluffs dans Bluff dans le fond, précise-t-elle, celui d’être réellement ensemble dans un même lieu et spectacle, celui du mensonge face à soi-même, celui de la réalité face au songe ou à la volonté, celui du regard des autres, celui de l’imagination, tout ça, dans un monde surmédiatisé. »

Technologie

La technologie est d’ailleurs au centre du spectacle puisque les trois interprètes agissent en temps réel, mais dans trois lieux et devant trois publics différents à chaque soir. Le rendu pourra paraître simple, mais la création ne l’était point.

 » En 2021, on est allé jusqu’à la générale. Quand on est assis dans la salle, ce n’est pas compliqué, mais on a travaillé fort pour y arriver en faisant plusieurs résidences de création. Le travail technique effectué est impressionnant aussi. C’était tout un défi. L’idée c’est de faire se sentir face à face les gens même s’ils sont à distance. »

La production utilise une technologie développée par la SAT et qui a été partagée dans une vingtaine de salles au Québec depuis quelques années.  » C’est la première fois qu’on va aller aussi loin avec la technologie « , dit celle qui a oeuvré comme consultante sur un projet similaire, celui du Théâtre PàP sur les régions ressources.

« La première étape a été la recherche dramaturgique pour trouver le bon texte et le bon ton dans le but de connecter des gens. En cours d’écriture, on a improvisé et repris finalement le texte avec deux auteurs, Jean-François Boisvenue et Sophie Gemme. La pièce a été écrite autour de la technologie dans le fond. »

Public

Le texte aborde la problématique de ce qui est vrai ou pas, honnête ou non, dans les relations humaines. Le sujet de l’authenticité fascine Mireille Camier, en fait, depuis longtemps. En 2017, elle avait mis en scène avec succès la pièce Ivresse de Falk Richter au Théâtre La Chapelle. La relation entre la scène et le public l’intéresse vivement.

Ici, les interprètes auront mis du leur dans leur personnage. En partant d’improvisations, « beaucoup de choses se sont mélangées entre ce qu’il et elles sont dans la vie et sur scène, mais le spectacle n’est pas axé là-dessus », insiste-t-elle.

Durant Bluff, les spectateurs et spectatrices auront tout de même l’impression que chacun des interprètes se confie à eux et à elles.

« Tout est en direct. Donc, mon défi à moi était de rappeler aux spectateurs que ça se passe ici et maintenant. Il y a des zones plus ouvertes durant la pièce où les spectateurs dans une salle savent qu’il y a en d’autres ailleurs. Rouyn et Alma font ainsi partie de l’imaginaire du spectateur à Montréal. Il y a aussi un jeu d’exclusivité entre les différentes salles. »

La question mérite d’être posée à nouveau, la vie ne serait-elle que bluff ?

Ce qui est vraiment vrai, par contre, c’est que les trois interprètes seront présents sur place pendant les trois représentations: Sarianne Cormier à Montréal et Gaspé, Étienne Jacques à Rouyn-Noranda et Véronique Pascal à Alma, Rimouski et Sherbrooke.


BLUFF est offerte en téléprésence à Montréal (Monument national), Rouyn-Noranda et Rimouski le 24 août, à Montréal (Maison de la culture Claude-Léveillée), Rouyn-Noranda et Alma le 15 septembre et à Rouyn-Noranda, Gaspé et Sherbrooke le 19 septembre.

Billetterie : https://petittheatre.org/billetterie-bluff