THÉÂTRE : Turbulences

Véronique Pascal dans Couper, photos: Fanny Migneault-Lecavalier

Rares sont les thrillers présentés dans nos théâtres. En voici un excellent au Prospero, Couper, du dramaturge australien Duncan J. Graham, traduit et interprété par la remarquable Véronique Pascal dans une mise en scène éclatante de Marc-André Thibault.

Prêt.es pour le décollage ? Attachez bien vos ceintures ! Seule en scène, Véronique Pascal nous entraîne dans une histoire d’agression où le public, réuni dans un cocon faisant penser à l’intérieur d’un avion de passagers, ressent, tout comme le personnage principal, une oppression grandissante, frôlant le cauchemar.

L’agente de bord parle de son métier, de sa vie, mais elle est obsédée par un homme qui la suit et qu’elle semble voir partout, tout le temps. Elle raconte une anecdote d’enfance de cruauté humaine, annonçant ce qui adviendra plus tard dans le récit. Mais arrêtons ici la description des mésaventures de la protagoniste afin de ne rien divulgâcher.

Dans la salle intime du Prospero, l’appareillage scénique est d’une telle ampleur qu’il nous fait croire à des rénovations récentes en ce lieu. Il n’en est rien évidemment. Mais l’utilisation du plateau est optimale dans la scénographie ingénieuse de Thierry Vigneault. L’un des côtés du « fuselage » disparaît à un certain moment durant le spectacle, révélant un autre espace où la narration se déroule.

De même, les lumières de Cédric Delorme-Bouchard jouent également un rôle prépondérant dans la construction de ce suspense anxiogène. Plusieurs scènes commencent ou finissent dans l’obscurité. Le personnage est éclairé de plusieurs façons originales, ajoutant au mystère de ce qui survient dans la pièce.

Et Véronique Pascal, énigmatique, changeante, troublée et troublante, fait de ce rôle un beau moment de théâtre. Elle occupe tout l’espace et semble même se télétransporter par moments. L’interprète d’expérience n’a aucune difficulté à nous faire croire à la détresse de son personnage. Au bord de l’hystérie, son agente de bord réussira tout de même à renverser la situation délicate de laquelle elle est prisonnière afin de se reprendre en main.

Tout, de l’idéation du spectacle à l’interprétation en passant par la conception, démontre que Véronique Pascal a dégotté une petite perle de texte dramatique qu’elle fait briller de tous ses éclats. Ce spectacle affirme haut et fort que l’empuissancement des femmes devient possible quand, enfin, la peur change de camp.


Couper est présenté au Prospero jusqu’au 1er avril.