THÉÂTRE: Ados déconfinés

Les ados méritent l’admiration depuis un an. Elles et ils ont renoncé à beaucoup de leurs activités sociales pendant la crise sanitaire tout en suivant leurs cours à distance. Le scriptarium 2021 du Théâtre Le Clou leur donne l’occasion de se lâcher lousse. On y découvre la langue de jeunes gens articulés, engagés, dont l’humour prend le dessus sur les frustrations. On peut entendre leurs textes jusqu’au 23 juin dans une œuvre radio fictive dirigée par Benoît Vermeulen.

La cohorte du Scriptarium 2021 est particulière. Bien sûr, il y le contexte d’une crise mondiale, mais aussi le fait que le spectacle ne sera pas présenté sur scène au Théâtre Denise-Pelletier. C’est une œuvre de radio fictive que Benoît Vermeulen a mise en oreille cette année. L’expérience l’a d’abord dérouté, puis littéralement captivé.

« Ça représente un horaire de travail complètement différent, mais c’est très agréable. Je suis très heureux d’avoir vécu cette expérience. Avoir travaillé avec ces jeunes me donne de l’espoir. Ils et elles ont été très participatifs, sans jouer les victimes en vertu de la crise. Ce n’est pas une génération « no future ». Je pense bien que j’aimerais en faire un autre. « 

Comme c’est un nouveau médium pour le metteur en scène, il a, avec son équipe, reçu une courte formation technique. Mais c’est tout l’échéancier de création qui est différent en numérique. Facilité cependant par l’apport de Francis Rossignol à la réalisation sonore et musicale et Marine Richard à la production.

Benoît Vermeulen, photo: Jean-Charles Labarre

 » D’habitude, on monte le spectacle en deux mois. Avec Le scriptatrium, on reçoit les textes à la fin du processus, donc cette fois, il a fallu travailler moins longtemps avec les interprètes. C’est toute la postproduction qui est longue, en fait. Pour ce qui est de la sensibilité, c’est la même chose. « 

Benoît Vermeulen aime le travail de répétition sur une base essai-erreur. Ici, la technique occupait plus de place que le travail en laboratoire.

« Comme metteur en scène après 30 ans de théâtre, je me suis rendu compte que j’écoute beaucoup avec les yeux. Là, c’est comme au cinéma avec le montage . Ça relève davantage du bricolage. Tout est figé avec la technique, ensuite, ça dépend de la dynamique qu’on crée en postproduction. »

Manal Drissi

La commissaire qui a guidé la forme d’écriture cette année est la chroniqueuse drolatique Manal Drissi. Après la sélection des textes des jeunes auteurs·trices, des dramaturges professionnels les ont encadrés en collant au genre « billet d’humeur », sauce Drissi.

Manal Drissi, photo: fournie par le TDP

« On a reçu beaucoup de textes, avoue Benoît Vermeulen. Les jeunes avaient énormément de choses à dire. Les sujets étaient foisonnants, riches. Ça tombait bien parce que je voulais aborder l’humour engagé. Mais je ne cherchais pas les punchs dans les textes. Manal a donné beaucoup d’indications pour que les jeunes dépassent le premier degré. »

Écriture et jeu

Les auteur·e·s en herbes cette année sont: Eliott Bensoussan, Ève Chamberland, Cylia Djani, Marianne Locas-Ouimet, Alexandre Mainguy, Iles Ousmer, Adélaïde Patenaude-Provencher, Juliette Rivard et Émilia Simard. Et pour interpréter leurs textes, le metteur en oreille a dirigé : Patrick Emmanuel Abellard, Lamia Benhacine, Émilie Bibeau, Benoît Drouin-Germain, Rose-Anne Déry, Clara Prieur, Lauriane S. Thibodeau, André-Luc Tessier, Anthony Tingaud et Lesly Velasquez.

Les primo-dramaturges ont abordé de grandes thématiques actuelles dont la crise, le racisme, la liberté d’expression, le féminisme, l’intimidation, la diversité. Mathieu Gosselin a réalisé le collage des textes et écrit les liants entre les scènes.

« J’espère que les auditeurs vont voir en écoutant, conclut Benoît Vermeulen. C’est un autre métier pour les interprètes, la radio. Certain·e·s avaient fait beaucoup de voix, donc ils et elles avaient cette retenue dans le rapport au micro. Si on compare au théâtre, on n’a moins à faire ample, mais il faut savoir jouer avec le micro. Comme à la télé, on joue avec la caméra. »