CIRQUE : L’avenir!

Robert Cookson dans Eklats, photo : Collectif Cookson-Lachance

L’avenir du cirque est déjà là. Et c’est un peu beaucoup celui des arts vivants en général qui s’y joue en raison d’une volonté hautement inclusive et interdisciplinaire. Depuis quelques années, le festival Montréal complètement cirque (MCC) démontre que les arts circassiens peuvent englober les autres sans coup férir. Ce n’est pas un hasard si plusieurs des jeunes artistes d’avant-garde sont passés par l’École nationale de Montréal. Et ça ne fait que commencer…

De Russie, Argentine, États-Unis, ils et elles sont venu.e.s poir apprendre. Ils et elles nous enseignent à leur tour jusqu’où le cirque peut aller… et plus loin encore! Depuis quatre ans, le festival MCC présente, en collaboration avec le Théâtre La Chapelle, L’autre cirque avec de jeunes auteur.e.s circassien.ne.s qui réinventent leur art.

Cette année, le collectif Cookson-Lachance y présente Eklats, un solo du spécialiste de la roue Cyr Robert Cookson qui dépasse largement les possibilités de cet appareil. Un univers poétique et abstrait est suggéré en utilisant une immense toile blanche qui prend vie par moments grâce à une manipulaiton rappelant l’art de la marionnette. La discipline de la danse est également effleurée par certains mouvements très « chorégraphiés » de l’artiste.

Sommes-nous dans sa tête ou dans un monde onirique? Le « brouillard » blanc qui paraît parfois menaçant n’empêche pas l’interprète de jouer avec des morceaux de roue Cyr qu’il tord et met en équilibre pour former des sculptures originales. Il jongle aussi avec des pièces de bois qui serviront ultimement à détruire ses propres sculptures. La prestation d’une heure se termine avec quelques acrobaties intéressantes à la roue.

Construction et déconstruction. Cette démarche artistique n’est pas sans rappeler celle des pratiquants des musiques dites actuelles. Quoique la représentation s’étire quelque peu inutilement, il s’agit du genre de performance qui fait avancer la façon de pratiquer les arts du cirque et de la scène. Sans prétention, mais surtout sans complexe.

La chose-en-soi

Anna Kichtchenko et Pablo Pramparo dans La-chose-en-soi, photo: Caroline Thibault

Le Chita Project procède du même esprit d’innovation. Ici, le main à main et la contorsion sont utilisés de manière à déconstruire le mouvement. En temps réel et au ralenti. Entre danse, art martial et acrobatie dans une attitude ludique de tous les instants. La chose-en-soi est un délice d’originalité et d’expérimentation.

Les artistes Anna Kichtchenko & Pablo Pramparo ont clairement analysé longuement les gestuelles des sports de combat et de la danse pour créer ce continuum exigeant basé sur la répétition et la beauté des corps en mouvement. Ils le font dans un environnement qui devient peu à peu surréaliste, comme si l’imaginaire l’emportait finalement sur la concrétude des choses en soi.

Malgré tout, l’apparition d’immenses gonflables vers la fin brise le rythme de la proposition sans ajouter vraiment à la beauté de la gestuelle développée par le couple d’artistes.

Et de Scandinavie…

Hege Eriksdatter Østefjells, Karoline Aamås et Love Kjellsson dans Plast, photo: ENT

Le cirque contemporain n’est évidemment pas qu’affaire d’ici, mais d’ailleurs aussi. Le festival a invité cette année quelques jeunes compagnies internationales qui relèvent également de l’avant-garde de leur art. C’était certainement le cas de la troupe franco-caribéenne Métis’Gwa et de son spectacle danse-cirque, Belles places, avec quatre interprètes féminines de haut niveau.

La même remarque s’applique aux Scandinaves de ENT qui présentent Plast où le continent de plastique est évoqué pour faire comprendre l’action des changements climatiques et, plus précisément, de la fonte des glaces. Les fabuleuses circassiennes Hege Eriksdatter Østefjells, Karoline Aamås sont accompagnées sur scène par la musique en direct, tantôt planante, tantôt plus rythmique, de Love Kjellsson.

Les spectateurs vont de surprise en surprise dans ce spectacle faussement simple, mais poétique et subtil. Les manoeuvres à la corde par les deux équilibristes se font dans une complicité touchante et vivifiante. L’inquiétude climatique fait ainsi place à la joie et au réconfort du collectif. La planète est en danger, mais, ensemble, on peut encore y arriver, nous dit les artistes de Plast.

PLAST par ENT (Nordic Climat) – YouTube


L’autre cirque est présenté jusqu’au 14 juillet au Théâtre La Chapelle

Plast est présenté jusqu’au 16 juillet sous le chapiteau l’Escapade à la TOHU